La seconde chance de l'Alpha

Adelie

J'ai attendu le matin pour dire à Alpha Archibald que je partais.

Je n'avais pas le courage d'aller le lui dire au milieu de la nuit et de déranger son sommeil et celui de Luna. Il sera probablement furieux que je me promène seule dans la forêt la nuit. Ce n'était pas non plus très féminin.

Aux yeux des autres, cela peut sembler sommaire et mauvais, ma mère m'a toujours appris à être gracieuse et élégante, on aurait dit qu'elle venait d'une autre époque. Si seulement ils pouvaient savoir que je suis la servante de la forêt, c'est tout ce que j'ai toujours voulu, que les gens sachent ce que je suis pour que je puisse avoir la paix.

Mon partenaire. Alpha Kairos. J'ai entendu des histoires sur lui. Des histoires horribles, cruelles, méchantes et maléfiques. Aucune des histoires que j'ai entendues ne correspondait à la réalité, mais qui dois-je croire, et quelle histoire ?

Certaines histoires racontent qu'il a tué la plupart de sa meute par ennui et que les autres sont emprisonnés à ce jour. Certains disent qu'il est en fait le diable qui parcourt la terre. D'autres disent qu'il a maudit les membres de sa meute.

Il m'a demandé si je voulais venir avec lui. J'avais peur de dire non car il n'y a jamais de fumée sans feu, je ne savais pas de quoi il était capable. Mais il était mon partenaire, si je n'y allais pas, cela nous tuerait lentement, lui et moi.

Je ne survivrai pas à un autre rejet, je devais tout faire pour qu'il ne me rejette pas. Une fois que vous avez rencontré votre partenaire, il n'y a pas de vie sans lui. Mais si je n'étais pas assez bien pour Alpha Hans, qui dit que je serai assez bien pour lui ?

J'ai passé toute la nuit éveillée à attendre impatiemment de parler à l'Alpha. A ce moment, je me tenais sur le terrain d'entraînement et j'attendais Alpha Archibald, il n'a pas tardé à me remarquer. Ma cape attirait beaucoup d'attention, même si la plupart des gens y étaient habitués.

Je pensais que cette fois-ci, ce qui attirait l'attention était des femmes sur un terrain d'entraînement. Les femmes n'étaient pas autorisées à s'entraîner, ni même à être ici, mais j'étais là parce que ce n'est pas comme si ça pouvait attendre.

« Adelie. Tu n'as jamais enfreint mes règles, j'espère que c'est important » a dit durement l'Alpha. Il n'était pas méchant, il était juste très responsable et mature. Mon Alpha avait une trentaine d'années, et il avait appris à être un Alpha digne de ce nom et à protéger sa meute. C'était un bon Alpha.

« Alpha, je suis désolée de vous interrompre, mais cela ne peut pas attendre. La nuit dernière, je me suis faufilée dans la forêt, » ai-je dit en commençant mon histoire. Je ne savais pas comment dire le reste.

« Adelie, j'apprécie ton honnêteté, mais ce n'est pas quelque chose pour lequel tu seras punie, alors je peux retourner à l'entraînement », a-t-il dit et il a commencé à se détourner, alors j'ai rapidement parlé.

« J'ai rencontré mon partenaire là-bas. »

Il m'a maintenant regardé fixement.

« Partenaire ? » Il avait l'air confus. « Ton partenaire est mort. N'est-ce pas ? » a-t-il demandé.

« Ma seconde chance », ai-je dit et son regard est devenu plus curieux. « Il s'est introduit dans une propriété privée, mais je crois que ce n'est que le lien d’accouplement qui l'a fait », ai-je dit, sans me rendre compte que je défendais Alpha Kairos.

« Il n'y a qu'une seule meute voisine. Qui est-ce ? » Il était prêt pour le pire. Je savais qu'il savait que c'était quelqu'un de la meute des Marcheurs de la Nuit.

« C'est quelqu'un de la meute des Marcheurs de la Nuit », ai-je dit au début, essayant d'obtenir sa réaction mais il n'a montré que de la curiosité.

« Qui ? Un Oméga ? » Je lui avais dit que mon précédent partenaire était un Oméga, il serait juste logique que j'obtienne un Oméga comme seconde chance. Je n'ai jamais rêvé que j'aurais un autre partenaire, alors je n'ai jamais réfléchi à mon mensonge.

« Non. L'Alpha », ai-je dit de la voix la plus calme que je pouvais.

L'Alpha s'est raclé la gorge en essayant de ne pas avoir l'air dérangé par ça. « Je vois. »

Il a redressé sa posture, « Kairos, si je ne me trompe pas ? » Je lui ai simplement fait un signe de tête, j'avais du mal à croire qu'il n'était pas sûr de son nom, tout le monde connaissait le cruel Alpha Kairos.

« Qu’est-ce qu'il t'a dit ? » a-t-il demandé, essayant d'obtenir un peu plus d'informations sur lui. On dit qu’Alpha Kairos n'a pas été revu après cette horrible nuit où la plupart de sa meute est morte.

« Il a dit qu'il sera personnellement ici à 17 heures pour m'emmener dans sa meute. »

« Et tu es d'accord avec ça ? » Il était confus.

J'ai forcé un sourire face à sa confusion. « Bien sûr, c'est mon partenaire. » Les partenaires ne pouvaient pas se blesser physiquement, je le croyais. Mais... J'ai aussi pensé que les partenaires ne pouvaient pas se rejeter l'un l'autre.

C'était mon partenaire et il était fait pour m'aimer. Même si c'est un monstre, j'étais sa partenaire et je pouvais l'aider à être bon. S'il m'emmène dans sa meute, cela signifie qu'il me veut comme partenaire, sinon pourquoi le ferait-il ?

« Ok. Merci de m'avoir prévenu », a dit l'Alpha, puis il est retourné s'entraîner.

J'avais déjà emballé toutes mes affaires. Il n'y avait principalement que des robes et quelques livres. C'était des livres de sorciers, mais il y avait des recettes utiles pour les potions. Seules les sorcières pouvaient faire fonctionner les potions, et je ne savais pas pourquoi je pouvais le faire. Je n'étais pas une sorcière de quelque façon que ce soit. J'ai toujours pensé que c'était à cause de mon père.

Aujourd'hui, je portais ma robe vert forêt, elle me descendait jusqu'aux chevilles avec un col en V et des manches en maille. Elle était belle et fluide. J'ai tressé mes cheveux en une épaisse tresse latérale et j'ai mis quelques fleurs, je voulais être belle pour mon partenaire. Même si je porte ma cape, je pense que mon partenaire me fera enlever la capuche à un moment donné.

J'ai attendu impatiemment jusqu'à 5 heures de l'après-midi. Mon Alpha était aussi impatient. Je pouvais le voir devant la maison de la meute, faisant les cent pas, les mains derrière le dos. Certains gardes ont même été appelés pour être ici. Je suppose que personne ne savait de quoi Alpha Kairos était capable.

A 5 heures pile, une voiture est apparue à ma vue par la fenêtre, une vieille Ford Mustang noire de jais. Le Bêta de ma meute a été envoyé pour récupérer mes valises. Je suis sortie de la maison et j'ai levé les yeux pour voir Alpha Kairos sortir de sa voiture, il était seul, et j'aurais pensé qu'il aurait amené quelqu'un avec lui. C'était dangereux pour les Alphas de voyager seuls, les Alphas ne voyageaient jamais seuls. D'un autre côté, nous étions des meutes voisines, et la route n'était pas longue, la voiture était surtout nécessaire pour récupérer mes affaires. Si je pouvais me transformer, je pourrais courir jusqu'à sa meute en un rien de temps. Il ne savait pas que je ne pouvais pas me transformer, je devrais lui dire à un moment donné.

Je ne l'ai pas regardé longtemps, il n'a même pas remarqué que je le fixais.

Alpha Kairos était habillé tout en noir, et son manteau noir n'arrangeait pas son look effrayant et mystérieux.

Il s'est dirigé vers Alpha Archibald. « C'est un plaisir de te rencontrer. Je suppose qu'Adelie t’a parlé de l'affaire ? » a-t-il demandé. Archibald a hoché la tête. Ils se sont tous deux serrés la main comme n'importe quelle autre personne.

« Puis-je te parler une seconde ? » a demandé Archibald à Kairos. Pendant une fraction de seconde, Kairos m'a regardé puis s'est éloigné avec Archibald.

Un garde était sur le point de les suivre mais Alpha Archibald l'a arrêté d'un geste rapide de la main.

Kairos

« De quoi voulais-tu me parler ? » ai-je demandé alors qu’Archibald nous a conduits à un arrêt où il n'y avait personne.

« Adelie », m'a-t-il répondu. Bien sûr, j'emmenais l'un des membres de sa meute. Il a probablement pensé que j'allais la tuer, comme le reste de ma meute.

« Qu'est-ce qu'elle a ? »

« Adelie est une fille étrange. »

Étrange ? Ça peut vouloir dire beaucoup de choses. Je savais qu'elle n'était pas une louve normale. Elle n'en avait pas l'air, elle était bien plus belle et bien plus gracieuse.

Je l'ai entendue dire quelques mots, mais je n'avais jamais entendu quelqu'un parler d'une telle manière. Elle semblait si calme, et sa voix était si apaisante.

Et elle portait à nouveau sa cape, pourquoi ? J'ai vu qu'elle était belle, alors pourquoi le cacher ?

« Elle a erré sur mon territoire il y a un an, elle s'était enfuie de sa meute », a-t-il dit.

« Pourquoi l'a-t-elle fait ? »

« Avec tout le respect que je te dois, je crois qu'il vaut mieux qu'elle se le dise elle-même. »

D'accord, ai-je pensé.

« Elle s'est toujours distinguée, son loup est très faible pour une raison quelconque, elle ne peut pas se transformer, mais je crois qu'il y a plus que cela », a dit Alpha Archibald.

« Tu penses qu'elle cache quelque chose ? » ai-je demandé, curieux.

Archibald a hoché la tête. « Pour une raison quelconque, elle avait toujours porté sa cape, je ne sais rien de son passé mais je ne pense pas qu'elle soit un loup-garou ordinaire. »

« Vampire ? Sorcière ? » ai-je demandé, si peut-être il avait une idée.

Il a secoué la tête.

« Je ne sais pas. Mais ce que je dis, c'est qu'elle a bon cœur et qu'elle pardonne, qu'elle fait passer tout le monde en premier et qu'elle est toujours très polie, bien élevée. »

J'ai écouté aussi attentivement que possible.

« Protège-la! » a dit Archibald. « Elle a l'air bien, mais elle est fragile, si jamais tu changes d'avis à son sujet, ramène-la ici et nulle part ailleurs ».

Sur ce, il s'est rapproché de moi. « Même si c'est dans un jour ou dans dix ans, ramène-la ici. Même si ce n'est que pour un an, elle a été l'Oméga la plus utile ici. Si tu la laisses faire, elle sera une grande Luna », a-t-il dit et il est reparti sans attendre de réponse.

Je suis retourné à l'endroit où se trouvaient deux valises, je les ai prises et les ai mises sur la banquette arrière de ma voiture.

Archibald s'est approché d'Adelie et a pris ses mains dans les siennes. « Prends soin de toi, Adélie, tu peux appeler quand tu veux. Tu es toujours la bienvenue ici. » Personne n'a même essayé de cacher le fait qu'ils pensaient que j'allais lui faire du mal.

Adelie l'a lâché et s'est tournée vers moi alors que je lui ouvrais la porte de sa voiture.

J'ai démarré le moteur et commencé à conduire, cela va prendre un certain temps, si nous étions sous notre forme de loup, ce serait beaucoup plus rapide pour rejoindre ma meute.

J'étais dans cette voiture et son odeur était partout. « Pourquoi portes-tu toujours ta capuche ? » lui ai-je demandé, je ne pouvais pas supporter ce mystère.

« Je suis comme ça », c'est tout ce qu'a-t-elle dit, mais ce n'était pas une raison suffisante.

« Enlève-la. » ai-je exigé un peu trop durement.

« C'est mieux si je le garde, Alpha » a-t-elle dit, en bégayant presque.

« Enlève-la. » Elle n'a plus hésité du tout. Elle l'a enlevée mais je n'ai pas osé la regarder. Si je regardais, je risquais de m'écraser.

Je suis allé droit au but. « Qu'est-il arrivé à ton partenaire d'origine ? »

« Il est mort. C'était un Oméga dans mon ancienne meute. » Comment peut-elle avoir un partenaire Oméga et Alpha ? S'il y a une seconde chance aux loups, c'est toujours la même gamme. Quelque chose clochait.

« Pourquoi t'es-tu enfuie ? » ai-je demandé.

Elle n'a pas répondu tout de suite. « La douleur, les souvenirs de lui étaient insupportables. »

Adelie

Ce n'était pas entièrement un mensonge. Ça faisait mal, mais ce n'est pas pour ça que je suis partie, je suis partie parce que ma mère et mon père me l'ont dit. S'ils ne m'avaient pas fait fuir, je serais probablement morte aussi maintenant.

« Ça fait toujours mal ? » a-t-il demandé, et ça m'a presque fait penser que peut-être il s'en souciait.

« Non. » Une fois que ton partenaire est mort, le lien est rompu. Mon lien n'était pas rompu parce qu'il était bien vivant. Je le sentais toujours. J'avais toujours une douleur horrible en pensant à lui. Seule la marque de Kairos pouvait faire disparaître cette douleur.

« Pourquoi tu ne peux pas te transformer ? » Je suppose qu'Alpha Archibald lui en a dit plus que je ne le pensais. Que dois-je répondre ?

« Je suis comme ça », c'était la réponse la plus facile.

« Tu es faible ? » a-t-il demandé non pas comme une insulte mais plutôt comme une déclaration. Je lui ai quand même fait un signe de tête. Ça me faisait toujours un peu mal que mon propre partenaire me traite de faible.

« C'est bien », a-t-il dit à voix basse. Mais pourquoi ce serait bien ?

Il n'a pas posé d'autres questions. J'ai donc supposé que c'était mon tour de poser des questions. « Qu'est-il arrivé à ta partenaire ? » ai-je demandé lentement. Et si je n'avais pas le droit de poser des questions ? Mais cela semblait être la question appropriée puisqu'il me l'a demandé.

« Je ne veux pas que tu me questionnes », a-t-il dit avec force en serrant son volant. Je dois l'avoir mis en colère, sa mâchoire s'est serrée et ses mains étaient presque rouges à cause de la force.

« Alpha Archibald pense que tu caches quelque chose. A propos de ce que tu es... »

Il a dit ça ? Quand lui ai-je donné une raison de penser cela de moi ? Mon mensonge n'était donc pas aussi lisse que je le pensais. « Qu'est-ce que tu es ? Qui est Adelie Murrell ? » a-t-il demandé, en essayant de maintenir sa colère.

J'ai avalé l'énorme boule dans ma gorge en prenant mon temps pour répondre. « Un loup-garou », ai-je dit. Je suis un loup-garou et c'était tout ce qu'on avait besoin de savoir sur moi. C'est ce que tout le monde pensait de ma mère et c'est ce que tout le monde pensera de moi.

Il a laissé échapper un rire amer. « Juste un loup-garou... »

Il n'a pas reparlé.

Kairos s'est arrêté devant une énorme maison. Elle était grise et avait l'air très vieille, vintage. Ce n'était pas vieux dans le mauvais sens du terme. Mais dans un bon sens. Elle avait l'air démoniaque, mais Kairos aussi.

Kairos n'est pas sorti. Il m'a regardée avec ses yeux noisette et a parlé. « Tu peux poser une question. »

Une question, ça voulait dire que je n’aurais pas le droit d’en poser d’autres.

Une seule chance. Qu'est-ce que je pouvais demander ? Sur sa partenaire ? Sa famille ? Sa meute ? Sur lui ?

« Es-tu aussi diabolique que ces histoires le racontent ? » ai-je demandé. C'était la réponse que je voulais le plus entendre, et ce qui comptait le plus.

« Non... dit-il, puis il s’est arrêté. Je suis bien pire que ça », a-t-il dit sincèrement, avec un sourire diabolique sur les lèvres qui a fait tomber mes tripes au sol.