L'humain de la Femme Fatale

MEGAN

« Le son du tambour fait descendre les filles. »

Pied gauche en arrière. Pied droit en avant.

« On l'entend dans les champs, il traverse la ville. »

Cul en l'air. Cul en arrière.

« Viens par ici, bébé, le jeu va commencer. »

Tourner dans le sens des aiguilles d'une montre.

« Mets ma main sur ta poitrine, écoute ton cœur s’emballer. »

Puis viennent les guitares et le signal de tourner dans le sens inverse des aiguilles d'une montre.

Au moment du deuxième refrain, Megan déplaça son poids vers le bas, s'accroupit dans une position de squat impossible et se mit à twerker de tout son cœur.

La foule en sueur et pleine de testostérone derrière elle rugit son approbation, et un sourire insolent s'afficha sur son visage.

Les dernières notes de sa chanson retentirent dans le club bondé, et la foule s'élança vers l'avant, applaudissant son approbation et se battant presque pour avoir une chance de la toucher.

Megan s'éloigna du bord de la scène d'un pas expert et envoya un doux baiser à un étalon au premier rang. Son visage sculpté se fendit d'un large sourire et il claqua des dents avec avidité.

« Laisse-moi t’offrir un verre », dit-il. Sa voix était douce et séduisante, et pendant un instant, elle envisagea d'accepter son offre.

Mais c'était le Ivy Dorm, pas un club de strip-tease sordide du mauvais côté de la voie ferrée.

Il y avait une centaine de beaux gosses ici tous les soirs, aussi bien des humains que des métamorphes, alors Megan décida qu'il valait mieux prendre le temps de faire un peu plus de lèche-vitrines avant de s'engager pour la nuit.

Elle fit un petit clin d'œil à l'étalon et se dirigea vers les coulisses, s'assurant qu'il soit aux premières loges pour voir ses fesses rebondir sur son passage.

Alors que la foule hurlait pour réclamer son retour, le présentateur cria dans son micro : « Et voilà la belle... L'insatiable... Mineeeeeeeeeette ! »

***

Il était environ six heures et demie du matin lorsque Megan expulsa sa conquête de la nuit de sa loge, se doucha et grimpa dans sa Range Rover flambant neuve pour quitter le club.

Alors qu'elle sortait son téléphone et le connectait au Bluetooth, elle repensa à son réchauffeur de lit de la nuit dernière.

C'était une loutre. Et non, ce n'était pas un euphémisme. C'était son animal métamorphe, bien qu'il ait gardé sa forme humaine la nuit dernière.

Il avait été bien, mais Megan préférait un tigre, un ours ou un loup pour lui tenir compagnie après une longue nuit de travail.

Même si elle était elle-même humaine, Megan était à l'aise avec les métamorphes et était l'une des rares humaines à connaître leur existence, parce qu'elle avait été élevée par des métamorphes bœufs.

Elle ne savait pas grand-chose de sa vraie famille, et ça lui convenait très bien. Pour elle, sa famille adoptive était sa vraie famille.

La seule différence entre elle et ses amis métamorphes était qu'en tant qu'humaine, Megan n'entrait pas en chaleur et n'avait pas de compagnon.

Cela ne la dérangeait pas du tout. La sœur de sa meilleure amie Myra avait récemment trouvé son compagnon et... Beurk. Megan était heureuse sans ces conneries de relations amoureuses, merci beaucoup.

En parlant de Myra, nous étions jeudi, et connaissant son amie, Megan était sûre que Myra était en train d'essayer désespérément de se rendre à l'école où elle enseignait après s'être endormie tard la veille devant Netflix.

Elle sortit son téléphone pour l'appeler.

« Coucou, ma poule », dit-elle en guise de salut, en appuyant sur l'accélérateur et en fonçant vers un feu orange.

Myra semblait stressée à l'autre bout du fil. « Salut, meuf. Je ne peux pas parler. Je suis en retard au travail ».

Megan éclata de rire en franchissant le feu de justesse. Elle connaissait si bien son amie.

« Besoin d'un chauffeur ? » demanda-t-elle, sans réussir à masquer le rire dans sa voix.

Myra poussa un énorme soupir de soulagement. « Je ne sais pas comment tu fais parfois. Mais je t’aime tellement, là tout de suite ! Dans combien de temps penses-tu... ? »

À ce moment précis, Megan s'arrêta devant la maison du père de Myra avant que son amie n'ait pu finir de parler. Elle donna un grand coup de klaxon.

Un instant plus tard, Myra se précipitait vers la Range Rover qui l'attendait. Elle venait manifestement de se réveiller. Ses cheveux étaient ébouriffés et ses yeux affolés.

« Tu me sauves la vie », dit Myra avec soulagement en grimpant dans la voiture. Elle se pencha et embrassa Megan sur la joue.

« Tu peux me remercier en venant au club ce soir », dit-elle.

Myra essaya d'esquiver la demande. Elle était une métamorphe modèle, sage, patiente et pleine de bonté depuis toujours. Berk.

Megan n'avait pas ces qualités. Elle avait étudié l'enseignement dans la même école que Myra.

Mais dès leur premier jour de stage dans une école primaire, avec tous ces morveux, Megan s'était empressée de quitter l'établissement.

Le soir même, elle avait postulé pour un emploi à l'Ivy Dorm et n'avait jamais regretté son choix.

Myra ne cessa de chercher des excuses pour expliquer pourquoi elle ne pouvait pas sortir en boîte de nuit pendant tout le reste du trajet.

Lorsque Megan s'arrêta devant l'école, elle se retourna pour fixer son amie et lui dit catégoriquement : « Tu viens. Fin de la discussion. »

Megan regarda Myra gémir, esquisser un sourire en coin, et sortir de la Range Rover.

La nuit va être mouvementée, pensa Megan en regardant son amie monter les marches de l'école.

Mais ensuite... Megan cligna des yeux, persuadée qu'elle avait rêvé. Mais c'était bien là.

Une forme sombre se profilait derrière Myra, et Myra ne l'avait pas vue.

Megan ouvrit la bouche pour avertir Myra, mais à ce moment précis, son amie sembla sentir la forme.

Myra fit volte-face, mais ne vit que... le néant.

Megan cligna des yeux. La forme sombre avait disparu.

Qu'est-ce que c'était que ça ?

Ce devait être un reflet. N’est-ce-pas ?

***

« Il est l’heure d'attraper des loups », lança Megan dans le rugissement du club.

Après avoir découvert que Myra était en chaleur plus tôt dans l'après-midi, Megan s'était donné comme mission personnelle de faire baiser son amie.

Si Myra était vraiment en chaleur, la meilleure chose à faire était de lui trouver une bite, et c'était précisément ce que Megan lui avait dit.

Myra avait protesté, et c'est pourquoi Megan l'avait envoyée chercher à boire pendant qu'elle repérait un compagnon de baise convenable pour son amie métamorphe.

Tout en dansant, elle commença à scruter le club à la recherche de quelqu'un du type de Myra.

Une paire de sportifs humains arrogants ? Non.

Un gars maigre, au look d’artiste, du type universitaire ? Mignon, mais pas pour Myra.

Deux sportifs qui comparent la taille de leurs muscles dans un coin ? Certainement pas.

Et puis elle repéra l'homme parfait. Un loup métamorphe dans la zone VIP au-dessus de la piste de danse. Il n'était pas du tout le genre de Megan, c'est pourquoi elle était surprise de l'avoir remarqué.

Il se tenait avec plusieurs autres métamorphes, et il était évident qu'il s'agissait d'un Alpha.

Un sourire victorieux se dessina sur son visage. Il était parfait !

Il ne lui restait plus qu'à trouver comment faire en sorte d’attirer son attention sur Myra sans qu'elle ne s'en aperçoive.

« Qu'est-ce que tu regardes ? » demanda une voix froide derrière elle.

Megan sauta d'un mètre en l'air et se retourna pour regarder son interlocuteur.

Un homme se tenait sur la piste de danse derrière elle, une expression dangereuse sur le visage. Megan sentit la chair de poule hérisser ses jambes sous son legging.

« Je vous demande pardon ? », demanda-t-elle. Cet homme la regardait comme si elle venait de voler la Joconde. Ici, dans son propre club.

« Beaucoup de gens veulent la mort de l'Alpha », grogna l’intrus, en faisant un signe de tête vers l'homme que Megan fixait.

Elle avait donc raison : le loup de l'espace VIP était un Alpha.

L'homme fit un pas menaçant dans sa direction.

« On est dans un pays libre, non ? » rétorqua Megan en mettant les poings sur ses hanches.

Il fit un autre pas vers elle. Ils étaient maintenant à quelques centimètres l'un de l'autre, et elle le fixa dans les yeux, le défiant du regard.

Même si cet homme était un connard, elle devait admettre qu'il était vraiment sexy.

Ses traits étaient réguliers et bien dessinés. Il ressemblait à un dieu grec devenu humain.

Oui, ça semblait stupide quand les filles le disaient dans les films, mais pour lui, c'était vrai.

Il portait des lunettes de soleil, ce qu'elle trouvait habituellement ridicule à l’intérieur. Mais pour une raison ou une autre, chez lui, cela ne faisait qu'ajouter à son air de mystère.

Megan avait une étrange envie d'arracher ces lunettes de son visage dédaigneux.

« Des renégats ont été aperçus dans les environs. Comment puis-je savoir que tu n'es pas l'une d'entre eux ? Je devrais t’arrêter tout de suite », dit l'homme, dans un grognement menaçant.

« M’arrêter ? Vous êtes son petit ami ou quoi ? » répliqua Megan.

Elle tremblait sous le regard furieux qu'il lui lançait.

« Je suis son bêta, et il n'y a rien que j'aime plus que de tuer des renégats », lui cracha-t-il en réponse.

« Mec, j'essayais de trouver un coup d’un soir pour mon amie. Bon sang… », dit Megan, surprise de voir sa voix trembler légèrement.

Soudain, les doigts du bêta se refermèrent sur son bras, les enserrant dans un étau. Il la rapprocha de lui et la regarda dans les yeux.

Megan sentit son cœur bondir dans sa gorge.

Le bêta ne prononça pas un mot, et se contenta de la fixer d'un air menaçant.

« Très bien, je vais chercher ailleurs », finit-elle par dire, se sentant étrangement impuissante sous son emprise.

« Bien », lui répondit-il sèchement.

Et puis, sans crier gare, il la lâcha et disparut dans la foule des corps qui se déhanchaient dans le club.

Megan resta figée sur place, ne sachant pas pourquoi son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine.

Elle avait tout le temps affaire à des connards. Pourquoi ce type avait-il eu un tel effet sur elle ?

« Hé ! » La voix de Myra, douce comme celle d’une petite fille, se fit entendre tout près d'elle.

Megan secoua la tête et sourit lorsque Myra s'approcha avec des boissons.

Elle n'allait pas se laisser effrayer par un gros macho comme lui. Elle savait que cet Alpha était exactement le type de Myra, et qu'elle allait attirer son attention, quoi qu'en dise son crétin de bêta.

Avant que Myra ne puisse se rendre compte que quelque chose n'allait pas, Megan concocta un plan.

Elle saisit le bras de Myra et l'entraîna sur la piste de danse en direction de la scène. Elle s'approcha d'une danseuse et lui tapota le mollet.

« Tu tombes bien, Minette. J'ai besoin d'une pause de quinze minutes ».

« Parfait. C'est tout ce dont j'ai besoin aussi ». Megan sourit malicieusement tandis que la jeune fille descendait de l’estrade. « Allez, Myra, monte. »

« Attends, quoi ? Meg... » Megan sourit et monta sur la scène sans attendre.

« Allez, viens. » Megan rit en entraînant Myra avec elle.

Elle fit un signe au DJ et la musique changea.

« Le son du tambour fait descendre les filles. »

Pied gauche en arrière. Pied droit en avant. Megan surveillait la zone VIP.

« On l'entend dans les champs, il traverse la ville. »

Cul en l'air. Cul en arrière.

C'est à ce moment-là qu'elle remarqua le bêta malpoli qui montait les marches menant à la loge VIP. Elle se mit à onduler de plus belle.

« Viens par ici, bébé, le jeu va commencer. »

Tourner dans le sens des aiguilles d’une montre...

Le bêta la remarqua. Il s'appuya sur la balustrade et retira ses lunettes de soleil, la fixant de ses yeux bruns perçants.

Instantanément, Megan sentit une décharge d'électricité la traverser, comme si elle avait été frappée par la foudre.

Elle ne pouvait plus bouger. Elle ne pouvait pas parler. Sa bouche était sèche.

Ses yeux étaient rivés sur les siens. Elle sentit la peur l'envahir.

Qu'est-ce qui se passe ?

Elle vit les yeux du bêta s'écarquiller également. Il était aussi pris au dépourvu qu'elle.

Megan ne savait pas si c’était une bonne nouvelle ou non.

Son regard était fixé sur son visage.

Ses yeux bruns étaient brillants, mais il y avait quelque chose de sombre à l'intérieur, quelque chose qu'elle voulait découvrir.

Et puis, tout à coup, Megan entendit des ricanements. Elle cligna des yeux et détourna son regard du bêta.

Les hommes sur la piste de danse en face d'elle riaient et se moquaient d'elle. Elle devait avoir l'air bien stupide, après tout, à rester là à regarder le carré VIP comme si elle était hypnotisée.

« Enlève le haut, ma belle », cria un homme. Sa chemise était ouverte et Megan pouvait voir ses abdominaux luisants de sueur.

Mais pour une raison ou une autre, cette vue ne l'excitait pas du tout. Elle se contenta de remarquer la vodka qu'il s'était renversée dessus et la façon dont il se déplaçait sur la piste de danse.

En fait, aucun des hommes devant elle ne l'excitait le moins du monde. Elle n'avait pas envie d'en ramener un seul chez elle. C'était comme si toute sa libido avait disparu en un clin d'œil.

Qu'est-ce qui lui arrivait, bordel ?

« Hé chérie, tu es sourde ou quoi ? Danse pour moi, salope », cria encore l'homme.

Megan cligna des yeux, comme si elle sortait d'une torpeur, et le regarda.

Il la fixait avec insistance, ses yeux parcourant son corps. Elle se sentit soudain très exposée.

Mais avant qu'elle n'ait pu descendre de la scène, l'homme monta pour la rejoindre, et il avança en se tortillant, un rictus dégoûtant sur le visage.

« S-stop », réussit à marmonner Megan, se sentant toujours prise dans une sorte de brouillard mental.

Il lui sourit, et elle entendit son souffle rauque et affamé.

« Je vais m'amuser avec toi... »

En un éclair, une forme floue descendit du balcon VIP et atterrit sur l'homme.

Avant que Megan n'ait eu le temps de réagir, le bêta de la zone VIP fonça sur l'homme et lui asséna une pluie de coups de poing.

L'homme, ivre, essayait de se défendre, mais il n'était pas de taille face au métamorphe.

Megan entendit un grognement s'échapper des lèvres du bêta, et elle sut qu'elle devait intervenir, sinon il risquait fort de tuer cet humain.

« Stop », cria-t-elle, saisissant le poing du bêta avant qu'il n'entre à nouveau en collision avec le visage de l'humain.

Donner des ordres lui permettait de se sentir à nouveau elle-même, et son esprit commença à s'éclaircir.

Jusqu'à ce que le bêta lève les yeux vers les siens, et qu'elle se sente soudain aussi confuse qu'avant.

Le bêta se leva, repoussa l'humain qui gémissait sur le côté et s'approcha d'elle. Son visage n'exprimait que la colère.

Megan se força à faire le même nombre de pas que lui vers l’arrière, jusqu'à ce qu'elle se sente arriver au bord de la scène.

Le bêta s'arrêta, la regardant fixement.

« Qui es-tu ? » siffla-t-il enfin, la voix pleine de venin.